Petit historique des styles des sièges français...

Style Louis XIII :

On commence à parler de style en tapisserie à partir du Louis XIII. En effet, grande nouveauté de l'époque : Les sièges commencent à recevoir des rembourrages fixes (contrairement au Moyen-Age et à la Renaissance où l'usage de coussins est le seul moyen de rendre plus confortables les assises).

Sous Louis XIII, on aime le bois naturel et surtout le noyer car facile à travailler et à sculpter.
Les bois sont volontiers torsadés, sculptés en balustre ou en chapelet.
Même si les garnissages restent très plats et peu  confortables, il se recouvrent de belles étoffes :
Tapisserie à verdure (motifs de bois et de végétaux), point de Hongrie, grosses rayures etc.

Les couleurs restent primaires et les finitions utilisées sont surtout de gros clous décoratifs ou plus rarement de la passementerie de laine.
Au niveau de la variété des sièges, le tabouret, la chaise à bras (pas encore nommée fauteuil), la chaise et banquettes sont parmi les sièges les plus représentatifs du style (les seuls à vrai dire).


Style Louis XIV :

A l'image de celui dont il porte le nom, le style Louis XIV est masculin, imposant.
S'il garde, dans le fond, les formes générales du style Louis XIII, il est cependant plus ostentatoire (bois doré, brocarts d'or et d'argent et autres étoffes soyeuses).


 

Coquilles, mascarons et autres sculptures d'influence antique restent très appréciées.
En province, le bois est laissé naturel et les étoffes sont plus classiques.

En ce qui concerne la garniture des sièges, elle est plus épaisse au niveau des assises et plus présente au niveau des dossiers (le confort, peu à peu, commence à réellement apparaître).




 Peu à peu, au fil du règne, les lignes vont perdre de leur rigidité et vont commencer à s'assouplir, annonçant l'arrivée de la Régence et du Louis XV.






Style Louis XV :

Contrairement au règne précédent, le style Louis XV est plus gai, moins pompeux et surtout.... plus féminin !
Les lignes, peu à peu, s'adoucissent et deviennent complètement folles (notamment quand on parle du rocaille).
Coquillages, fleurettes et autres motifs naturalisés ornent les dossier et les ceintures des sièges.
La société tend à se replier dans des appartements à taille plus humaine et intime.
C'est l'époque où apparaissent de nombreux sièges pour dames (et même pour messieurs).

Le Cabriolet est sans le siège le plus représentatif de ce style. En effet, de petite taille, facile à déplacer et surtout très confortable de par la forme de son dossier, celui-ci à vite sût se rendre indispensable à la vie des salons.


Citons l'apparition de la Voyeuse (ou Voyelle) servant à suivre la partie de jeu en y étant accroupi ou à califourchon.
Turquoise, Paphose et Ottomane sont des canapés au forme variées (influence orientale).
De même, certains sièges étaient réservés à des usages spécifiques : le siège à coiffer, le siège d'homme ou de cabinet, la Fumeuse etc.


Le goût est au confort comme en témoignent les bergères à l'assise garnie de plumes et leurs "grandes-sœurs" les Marquises (bergères à 1 place et demie).
Les tissus à motifs naturels sont à la mode. Lampas fleuris, motifs chinoisant, tissus somptueusement brodés mais aussi velours plus simples, unis, de couleurs foncées ou claires sont des valeurs sûres pour ce style.
Le rembourrage, s'il n'est pas très différent du style Louis XIV, est cependant plus rond, plus "dodu".


Style Louis XVI :

Ainsi qu'il en est pour la mode, les goûts passent d'un extrême à un autre.
Sous Louis XVI, la mode est à l'antique (notamment en raison des découvertes des sites d'Herculanum et Pompeï).
L'ordre classique est remis à l'honneur mais les étoffes restent féminines et les couleurs claires.

Le travail des tapissiers commencent à prendre ses lettres de noblesses. Les garnitures sont de plus en plus piquées et travaillées finement.





Pour les finitions, la passementerie est très à la mode (même si les clous décoratifs restent de mise).
Comme pour le style précécent, les soieries, tapisseries (Gobelins et Aubusson) et velours sont utilisés.



Style Directoire :

Le style Directoire n'est autre qu'une réinterprétation du Louis XVI mais en y ajoutant des attributs révolutionnaires (sur les sculptures ou les étoffes).


L'influence de l’Égypte commence à apparaître (pieds en patte de lion, en sabre etc.).


Style Empire :

Militaire, imposant, raide..... c'est le style Empire.
Napoléon impose son image et son goût à toute l'Europe.
Alors que sous Louis XVI, les bois sont volontiers réchampi blanc, l'Empire lui préfère les bois sombres tels que l'acajou de cuba et autres essences exotiques parfois agrémentées de bronze doré et sculpté.
Les étoffes sont somptueuses (beaucoup de soieries à motifs napoléoniens, de velours de soie frappés etc.).
Les encouragements de l'Empereur pour les manufactures françaises est très important. Les tapisseries sont toujours utilisées (les motifs évoluent).
Le tapissier devient l'acteur de la décoration des demeures. Draperies, décors de lits ou muraux, rideaux, coussins et surtout sièges atteignent un niveau de qualité jusque là jamais égalé. Les garnitures, piquées au maximum deviennent fines, aux lignes très pures (presque plates) et surtout très.... inconfortables ! Mais qu'importe puisque cela sied à l'Empereur.
 Apparition de la méridienne ou récamier (en hommage à Juliette Récamier, déclarée plus belle femme de son époque, et en rapport à un tableau sur lequel elle est représentée allongée sur un meuble semblable à celui-ci).

 
Passementeries, glands, franges et cordonnets sont splendides et naissent des dessins des grands passementiers du début du XIXè siècle.







Style Restauration :


 LouisXVIII se contente de conserver le mobilier de son prédécesseur en prenant le seul soin de lui ôter tous ces attributs napoléoniens.



Peu de nouveauté dans les formes si ce n'est un assouplissement général et une plus grande simplicité, annonciatrice du style suivant.




On apprécie les essences plus clairs (érable, citronnier) souvent marquetté de palissandre ou de bois plus sombres.






Style Louis-Philippe :


Le style Louis-Philippe témoigne d'un changement social important. Même s'il réinstaure une vie de cour, le Roi des français reste un roi bourgeois et bonhomme.
Sans grande pompe, le style Louis-Philippe est le témoin du début de l'ère industrielle. On commence à produire en grande quantité des ameublements complets (début des grands magasins) qui, s'ils sont de qualités, manquent un peu de fantaisie.


Suivant la clientèle, les étoffes utilisées sont somptueuses ou un peu plus raisonnables.
Le papier peint tend à laisser un peu la tenture murale (surtout d'un point de vue financier).
Le goût devient très tapissier. Les sièges se parent de capitons, deviennent complètement recouverts et surtout plus confortables (généralisation de l'usage des ressorts en 1825).

Citons l'apparition d'un incontournable des salons (même encore aujourd'hui) le fauteuil Voltaire et le fauteuil Crapaud.


Style Napoléon III - IIIe République :

Voilà l'apogée du tapissier.... le style Napoléon III !
Il faut briller en société, il faut éblouir chez soi également.
La petite bourgeoisie s'enrichit, l'Empire s'étend, la cour est plus pompeuse que jamais.
L'époque est à la surcharge et au méli-mélo des influences (gothique, renaissance, classique, antique, rococco oriental etc.).

 
Le tapissier est appelé au moindre caprice de la maitresse de maison.
On recouvre, garni et capitonne tout. La moquette, alors appelée tapis-plein fait son apparition (décors chargés de fleurs ou rinceaux, surtout sombres).
Les fenêtres débordent de passementeries, draperies, rideaux de toutes sortes. Très théâtral, on habille les portes, les tiroirs, les armoires, les malles, les murs et les plafonds parfois et même les cheminées se drapent de velours.
Pour se donner l'impression de sa richesse, les bois sont noircis (imitant ainsi le luxueux ébène). Les sièges s'incrustent de nacre (influence anglaise) et se parent de bouquets de fleurs.
Jamais on n'avait inventé autant de sièges de toutes sortes. Volontiers entièrement recouverts et au pieds cachés sous des draperies ou des franges, seul le travail du tapissier est à l'honneur. Et en effet, les techniques françaises deviennent universellement reconnues comme les meilleures.
On fait des sièges capitonnés, à rampe torse ou non, durs ou très mous.
Apparition du Confident, de l'Indiscret, de la Borne, de la Boudeuse et d'une multitude de petits sièges et canapés.



La chute de l'Empire n'entrainera pas de changement radical dans le goût de l'époque. Au contraire, les choses iront en s'amplifiant jusqu'à la fin du siècle. (Notons que le style Napoléon III restera en vogue jusqu'en 1940 parfois).





Voici quelques exemples de lithographies d'intérieur sous Napoléon III




Style Art-Nouveau :


Le 1900 est une gigantesque récapitulation de tous les styles, de toutes les époques et de tous les pays.




Les meubles qu'il produit imitent aussi bine la Chine que l'Espagne, le Gothique que le Boulle, mais il marque toutefois quelques préférences.

La Haute Époque et le débuts de la Renaissance sont particulièrement prisés : tout ce qui est proche du Moyen Age et tout ce qui paraît d'inspiration chrétienne est à la mode.

De même, les styles exotiques d'où qu'ils viennent et le Louis XV sous sa forme la plus exubérante sont également privilégiés. Mais on reconnaît aussi des influences espagnoles, italiennes et anglaises dans l'ameublement de cette période qui semble vouloir refuser toute originalité et n'accueille pas sans réticence le seul effort de renouvellement qui soit entrepris à ce moment-là : le Modern Style.
Toutefois, si forte est la tendance à la synthèse que le Modern Style lui-même finit par imposer parfois, sinon ses formes, du moins des éléments de son ornementation et quelques-uns des ses thèmes dans certaines copies, déformées ou travesties, de meubles anciens. Le résultat est un mélange assez surprenant qui fait beaucoup de meubles de l'époque 1900 des carrefours d'influences contradictoires.

Le Modern Style est resté, à beaucoup d'égards, un style expérimental, un style de théoriciens. S'il a profondément marqué son époque, c'est qu'il représentait la seule tentative de création originale dans le domaine de l'ameublement. Mais il marquait une rupture trop nette et trop profonde avec les traditions qui l'avaient précédé pour connaître un succès rapide, et les circonstances historiques ne lui laissèrent pas le loisir de connaître une grande diffusion.

Né vers 1885-1890 dans les ateliers de quelques grands ébénistes (Majorelle, Vallin, Gallé, Gaillard, Cona), qui étaient souvent aussi des céramistes, des orfèvres, des verrier, il devait être emporté avec le premier conflit mondial (1914) qui, brutalement, mit fin à la Belle Epoque. C'est ce qui explique à la fois la rareté des beaux meubles caractéristiques de ce style et surtout l'absence de certains éléments importants de l'ameublement d'une maison ou d'un appartement entièrement et authentiquement Modern Style. 
C'est un style ou le travail du tapissier n'est pas vraiment mis en avant. Les garnitures restent simples au maximum.






Style Art Déco :


Les meubles n'ont pas encore échappé tout à fait au goût de la Belle Epoque pour la ligne courbe et sinueuse. Toutefois, ils sont également influencés par les recherches esthétiques des peintres cubistes ou abstraits et des architectes fonctionnels qui donnent une importance nouvelle aux volumes géométriques. Cela explique que leur ornementation et leurs formes soient parfois un peu désaccordées. La meilleure production de l'époque est sans doute celle qui se rattache le plus clairement à la tradition du XVIIIe siècle français.
 Le style Arts Décoratifs, qui est résolument un style luxueux, se préoccupe peu de rentabilité industrielle ou de prix de revient ; c'est pourquoi il n'hésite pas à recourir à des matériaux coûteux.

 Les bois exotiques sont utilisé de préférence aux bois européens. Tous les bois foncés sont en faveur, en particulier l'ébène et le macassar. On emploie également le palissandre, l'Amboine jaune ou rosé et l'acajou.
Le sycomore, le citronnier et le bois de rose sont réservés au placage et à la marqueterie. Le bois laqué est très employé. Les cuirs et les textiles. Le cuir (surtout le cuir clair) prend peu à peu autant d'importances que les textiles pour recouvrir les sièges. Il est souvent travaillé. On le voit apparaître également au centre des panneaux, sur les plateaux de table ou de bureau et, en gaine, sur les pieds de nombreux meubles.
L'ivoire. Très en faveur, il est employé en marqueterie, en incrustations, en larges plaques. Il sert même de gaine à certains sabots de petits meubles d'ébène.

D'un point de vue garnissage, il faut noter que le guindage suspendu (technique apparue chez nos amis Anglais à la fin du XIXe siècle) qui permet  un confort inégalé est très souvent utilisé pour garnir les gros fauteuils (et notamment les clubs).